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La traversée de Nullarbor

Les conseils des locaux allaient dans deux sens très opposés « Ne le faites pas, c’est une perte de temps et d’essence, il n’y a rien » et « C’est une grande expérience, c’est presque comme un rituel de passage pour les habitants de Western Australia, il y a des endroits magnifiques et ça vous donnera une idée des distances…».

Dans tous les cas, on était prévenu : il n’y aurait rien. Et « rien » au sens australien du terme… !

Ce serait un peu la mise à l’épreuve de notre van, notre première grosse étape et un bon moyen d’effleurer enfin l’immensité de l’Australie.

On était donc tout chaud d’impatience (et aussi du fait qu’on n’avait pas la clim) ! Les pneus changés, la vidange faite, les bidons remplis d’eau et un dernier plein d’essence à prix raisonnable, nous étions parés pour la route.

La plaine de Nullarbor en elle-même s’étend sur environ 1200 km, démarre un peu après Norseman et prend tout son sens quand les arbres cèdent définitivement leur place à de très bas buissons. Le décor s’aplatit, le vide s’installe progressivement avec l’impression de pouvoir voir si loin mais n’avoir rien à voir. Même le ciel est vide de nuages.

La première nuit, allongés sur le toit du van (on ne dira pas qu’on était trop lourd, qu’il s’est enfoncé, qu’il a abaissé le plafond intérieur et qu’on n’arrivait plus à ouvrir nos placards découpés sur mesure…), nous passons un moment à admirer le ciel et compter les étoiles filantes en nous plongeant encore plus profondément dans cette idée d’immensité.

Le décor glisse à 100 kilomètre à l’heure et le temps s’étire avec le paysage. On passe les frontières, on décale les horloges… On perd nos repères mais on commence à prendre doucement conscience de la distance.

Les carcasses de kangourous au bord de la route entrent dans la cadence régulière et monotone de ce long voyage. Seule l’odeur arrive à nous surprendre encore…

Il n’y a pas âme qui (sur)vive dans le Nullarbor, à part les quelques familles qui font tourner les roadhouses (genre de stations service/motel/pub que nous croisons tous les 300 km en moyenne).

Et puis la monotonie se brise soudain lorsque la route passe proche de la côte. Sur plus de 200 km s’étendent des falaises abruptes et encore friables. Cette plaine immense que l’on croyait infinie s’achève brutalement comme le bout du monde. C’est là que l’on comprend comment les gens ont pu penser que la terre était plate, comme une grosse galette qui flotte dans un océan sans fin.

La petite ville de Ceduna marque la fin du Nullarbor et signifie dans la langue aborigène locale « là où l’on peut s’asseoir et se reposer ». Concrètement, nous parcourons encore quelques centaines de kilomètres avant de voir se réinstaller progressivement la marque de l’homme sur le paysage, des vaches, des champs et les girouettes typiques de la campagne australienne.

On fait un détour par Streaky Bay pour s’amuser dans les dunes de sables et expérimenter un autre genre de désert…

Après un peu plus de 3000 kilomètres depuis Espérance, 7 jours sur la route et une moyenne de 5 heures de conduite quotidienne, 4 frontières de 3 États, la plus grande route en ligne droite d’Australie, 3 douches solaires et une méduse, une bière, l’aménagement d’une souris dans notre van, le plein d’essence le plus cher et une collec’ d’étoiles filantes à faire péter les scores d’un Guinessbook des records, nous arrivons à Wodonga, de l’autre côté du Victoria.

Kylie, Dave et leurs 3 enfants attendent de nous confier leur maison pour partir en vacances…